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Cosmétiques au romarin

Présidentielle 2025: L’enracinement du dégagisme


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Les résultats des élections présidentielles sont connus. Paul Biya a été déclaré vainqueur, par 53,66% contre 35,19% pour Issa Tchiroma Bakary. Bien avant la proclamation de ces résultats, les rues, dans certaines régions du pays, étaient déjà à feu et à sang. Et les souvenirs des années de braises (1990-1994) refont surface, avec leur kyrielle de brimades, d’intimidations, de répressions, d’arrestations et de morts.


De hauts cadres de partis politiques de l’opposition et notamment ceux du Fsnc, le parti d’Issa Tchiroma Bakary, sont aux arrêts, et le plus souvent portés vers des destinations inconnues. Djeukam Tchameni et Anicet Ekane, de l’Union pour le Changement, de même que Mme Florence Aimée Titchio, enseignante au Lycée Technique de Douala et trésorière du Manidem, sont désormais dans les mailles de la police. Il en est de même du Pr Aba’a Oyono. L’on ne compte plus les nombreux anonymes, qui croupissent désormais dans les geôles du régime, et dont le seul crime est d’appartenir au Fsnc. Les arrestations se font désormais au faciès et, à ce qu’il paraît, nos compatriotes originaires des Régions de l’Adamaoua, du Nord et de l’Extrême-Nord, sont particulièrement victimes de ces exactions. Le quartier de la Briqueterie où vivent majoritairement ces compatriotes, est désormais surveillé comme de l’huile sur le feu. L’on note, de temps en temps, des incursions de l’armée en ces lieux, aux fins de procéder à des arrestations dans une illégalité la plus abjecte, (sans convocation, ni mandat d’amener du procureur).  De plus, tel dans des films de mauvais goût, ces arrestations se font de nuit, ou à l’aube. Le prétexte tout trouver est la recherche des armes. Une imagination sortie tout droit des affres de la répression du régime, qui s’abat désormais sur toutes les voix dissonantes.


Dans cette course effrénée contre le droit à la liberté d’aller et de venir, à la liberté d’expression, à la liberté de manifestation, à la liberté de réunion, à la liberté tout court, le pouvoir se sert avec délectation de la répression, des représailles et de l’emprisonnement des principaux leaders d’opinion et des membres de la société civile. Le régime s’en sert comme levier de son cramponnage aux rênes d’un pouvoir, dont il ne veut point démordre.

Jamais au grand jamais, le pays n’avait connu en quelques jours, des arrestations aussi massives qu’inexpliquées, et la banalisation aussi cruelle des libertés fondamentales. Désormais, seul l’arbitraire règne, manipulé, manigancé et enrégimenté par les cerbères à la solde du régime. Les rues grouillent pourtant jour et nuit, de manifestants, qui ne demandent rien moins que le départ de l’homme qui occupe actuellement le Palais, pour cause de fraudes électorales alléguées. La police et l’armée chargent, pour le moment, sans trop de succès, occupés qu’ils sont sur d’autres fronts non moins importants que constituent la crise sécuritaire du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, et la lutte contre Boko Haram dans l’Extrême-Nord. C’est dire si la dissipation des forces de répression est réelle. Pourront-elles tenir sur le long terme, sur l’ensemble du territoire national ? Rien n’est moins sûr, ce d’autant que les effectifs sont peu nombreux pour contenir la fougue et la vague populaire qui, pour l’heure, ne cessent de monter en puissance.


Il y a longtemps que l’on a dépassé le cap de la négociation et d’un retour à l’accalmie, comme en témoigne du reste le durcissement du pouvoir, avec la vague d’arrestation des militants de l’opposition et des membres de la société civile.

Dans cette opposition, de même que dans la société civile, l’on constate un enracinement de plus en plus croissant du dégagisme, qui semble être la seule alternative concédée au régime en place. C’est dire qu’en réalité, le pouvoir, du fait de son jusqu’au-boutisme, est en train de faire le lit de sa propre fin. Le temps a toujours été favorable au N’nom Gui. Cette fois, le sort et les astres lui seront-ils toujours serviles ? Seul l’avenir nous le dira. Toujours est-il que l’on assiste sous nos yeux, à la trituration du destin d’un pouvoir vieux de près d’un demi-siècle.

L’on n’en veut pour preuve que le rythme accéléré dans lequel se déroule les évènements. Le seul maillon du puzzle qui reste à compléter est l’arrestation du commandant en chef des forces de l’opposition, à savoir Issa Tchiroma Bakary. Pour l’heure, un sursis aurait été donné à cette éventualité. Toutefois, elle ne serait que partie remise. Connaissant la psychologie jusqu’auboutiste et l’appétit gargantuesque des hommes du sérail pour les délices du pouvoir, il serait fort surprenant que ces derniers ne franchissent pas le rubicond, eux qui aiment à parler de « ligne rouge ».  Et c’est ici que l’acteur pourrait mourir dans son propre film, car alors, l’on verrait surgir du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest, des hordes de jeunes prêts au sacrifice suprême pour Issa Tchiroma Bakary.

Pour l’heure, le pays vit dans la chienlit, avec sa cohorte d’incertitudes, de déconvenues et de décrépitudes. Toutes choses qui enracinent et favorisent le dégagisme. Celui-ci se nourrit de plus en plus d’un sentiment d’incompréhensions vis-à-vis des réalités subséquentes aux élections du 12 octobre dernier. Afin de se prémunir de sa propre chute, le pouvoir est devenu autiste, rendu sourd-muet-aveugle par la déflagration de ses gaz lacrymogènes, ses canons à eau, ses sirènes hurlantes et autres Kalachnikovs, qui arpentent désormais les rues de jour comme de nuit, et sonnent comme le chant de cygne d’un règne bientôt cinquantenaire.


Tientcheu Kameni Maurice

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